Arrivée des sœurs polonaises à Marvejols
Quatre sœurs polonaises sont arrivées en Lozère le 23 août 2021.
Ce sont des sœurs chanoinesses du Saint-Esprit de Saxia, de Cracovie, et qui viennent s’établir à Marvejols.
+ Leur fondateur: frère Gui de Montpellier et son œuvre.
Frère Gui, né en France dans la seconde moitié du XIIe siècle et mort à Rome au début de 1208, était probablement un des fils cadets de Guilhem VII, puissant seigneur de la ville de Montpellier et proche du roi d’Aragon, et de sa femme Mathilde de Bourgogne, sœur du duc de Bourgogne. La ville de Montpellier, bien gérée depuis plusieurs siècles par les Guilhem, était extrêmement prospère, elle attirait marchands et pèlerins et sa population grandissait sans cesse, ce qui créait de nouveaux besoins.
Avec l’aide de Guilhem VIII et de riches habitants, Gui, sensible à la souffrance des pauvres et des isolés nombreux dans sa ville, quitta la vie mondaine pour fonder vers 1190 à la sortie de Montpellier en direction de Rome (aujourd’hui au pied du Palais des Congrès-Corum) un premier hôpital du Saint-Esprit qui accueillait toutes les misères, que les malheureux soient issus de la ville ou de l’extérieur. Son exemple attira des frères et des sœurs et il rédigea ses propres « Institutions » pour organiser la « vie régulière » de ces nouvelles communautés vouées à l’hospitalité, à Montpellier et dans les fondations qui suivirent rapidement. Dans ces établissements originaux nés du charisme de Gui, les pauvres étaient accueillis dans la maison religieuse, non dans une aumônerie extérieure.
+ Approbation de l’ordre
En avril 1198, frère Gui se rendit à Rome pour demander la protection du pape car sa fondation très novatrice était mal acceptée par le clergé local. Le pape Innocent III, en confirmant ses Institutions et ses fondations, fit de ce fondateur un éloge extraordinaire, louant son choix de vivre dans l’obéissance au Saint-Esprit et dans la plus grande pauvreté, comme son choix d’accueillir toutes les formes de misère. Il souligna que dans leurs hôpitaux les religieux du Saint-Esprit étaient « les plus pauvres parmi les pauvres qu’ils servaient ». La règle de l’ordre hospitalier du Saint-Esprit, fondée sur les œuvres de miséricorde énumérées en Matthieu 25, prévoyait en plus l’accueil les prostituées qui voulaient sortir de leur esclavage et des tournées en ville pour ramener les miséreux à l’hôpital : avec l’aide d’Innocent III, frère Gui, qui a été appelé le Saint Vincent de Paul du Moyen Age, a aussi été le fondateur du premier SAMU social.
Admiratif, peu après Innocent III confia à frère Gui son nouvel hôpital pontifical à Rome, tout près de la basilique Saint Pierre : ce fut l’hôpital du Saint-Esprit in Saxia. Et en juin 1204 ce pape confirma pour cet hôpital les Institutions de frère Gui et de sa communauté de Montpellier, qu’il unit à celle de Rome, ce qui était un privilège inouï. Puis, en juin 1208, lors de l’élection du successeur de Gui, Innocent III transféra la Maîtrise générale de l’ordre dans l’hôpital du Saint-Esprit in Saxia de Rome : ce qui explique le nom de nos sœurs polonaises.
Partout, la dévotion à l’Esprit Saint signifiait l’humilité et l’adaptation aux besoins changeants, dans l’ouverture et la confiance. Contemporain de saint Dominique, qui se convertit lui-même à la vie pauvre en 1206 à Montpellier, frère Gui et son ordre hospitalier du Saint-Esprit ont contribué à la réforme de l’Eglise voulue par Innocent III en faisant rayonner l’accueil et la charité envers tous ceux qui étaient isolés, rejetés, en danger, quels qu’ils soient.
De gauche à droite : Sœur Talita, Sœur Alexandra, Sœur Aline, Sœur Iréne
+ Développement de l’ordre
En avril 1198, frère Gui, se laissant guider par l’Esprit Saint Père des pauvres, avait déjà fondé une dizaine d’hôpitaux du Saint-Esprit dont plusieurs dans le Midi : Montpellier, Marseille, Millau, Largentière … et même, au pied de Cénaret, un petit hôpital à Barjac, qui semble devenu ensuite une annexe de Millau. Par la suite, la protection du pape et l’exemplarité évangélique de l’ordre amenèrent d’autres nombreuses fondations un peu partout en Europe et notamment en Franche-Comté et en Lorraine. Les Hospitaliers du Saint-Esprit sont arrivés en Pologne il y a 800 ans : à partir de 1220 ils y ont multiplié les fondations : Cracovie la maison mère, Sandomierz, Kalisz etc.
+ Présence dans le monde
Aujourd’hui, à Rome l’hôpital du Saint-Esprit in Saxia, magnifiquement reconstruit par divers papes, existe toujours entre la basilique Saint-Pierre et le Tibre, mais depuis longtemps il n’est plus géré par l’ordre.
Cependant, la mémoire de frère Gui, fondateur de l’hôpital de Montpellier, 1er recteur de l’hôpital de Rome et auteur de la règle, est vénérée par les religieuses de son ordre. Et son charisme, l’abandon à l’Esprit Saint pour s’adapter en vue de soulager avec amour toutes les misères, est répandu dans plusieurs pays. En France subsistent en Lorraine les religieuses Hospitalières du Saint-Esprit de Rouceux-Neufchâteau et à Montpellier un petit groupe de laïcs rattachés à l’ordre(Confrérie) , né de la célébration en 1998 du 800e anniversaire de la confirmation de l’ordre par Innocent III. En Espagne, quatre monastères de « Comendadoras del Espiritù Santo » : en Navarre, Puente la Reina et Sanguësa, en Andalousie, Séville et El Puerto de Santa Maria-Cadix. En Pologne, la Congrégation des Chanoinesses du Saint-Esprit in Saxia, communauté de vie apostolique, compte 240 sœurs. Elles mettent en œuvre le charisme de frère Gui en servant les malades, les enfants, les pauvres et nécessiteux en Pologne, en Ukraine, en Italie et en Afrique au Burundi, où elles ont plusieurs communautés et un noviciat. On pourra maintenant ajouter dans leur liste de fondations : Marvejols. Nous remercions les Sœurs Dominicaines, d’accueillir dans leur couvent cette fondation.