De la fête de l’Ascension à celle de Pentecôte
Le jeudi de l’Ascension, nous avons été invités à tourner nos regards vers le ciel ! Devant les apôtres, Jésus est élevé. Un nuage le dérobe à leurs yeux. Ils restent là à regarder la montée, le départ de leur Seigneur ! Telle est peut-être aussi l’image que nous gardons de l’Ascension : l’image d’un départ sans retour. Triste fin, pourrait-on dire ! Cette fête de l’Ascension nous invite à orienter nos cœurs et nos intelligences vers le haut… C’est un fait, depuis la nuit des temps, dans les civilisations et les cultures, le ciel fascine. Les nuages, les étoiles, la lumière ou la nuit, et l’univers inaccessible… Tout est ici une question.
Le ciel est en effet, d’abord, une interrogation. Une galaxie compte des milliards d’étoiles et il existe des milliards de galaxies. Chacun pourrait reprendre le mot de Blaise Pascal : « Le silence éternel des espaces infinis m’effraie ». Des scientifiques sont aussi écartelés. Je pense à Jacques Monod, prix Nobel de physiologie. Il s’interrogeait, lui aussi, devant le ciel et son immensité : « Que sommes-nous, qu’est-ce que l’homme ? Je n’hésiterai pas à dire que j’aurai traversé l’existence dans un état d’incompréhension effarée ». Le ciel est, pour tous, une interrogation.
Le ciel est, aussi, comme un émerveillement. La parole biblique : « Dieu créa le ciel et la terre » donne le réconfort d’une assurance. Par amour, Dieu a voulu le monde et l’homme au cœur du monde. Par amour, Dieu a créé l’univers, et à l’homme – qu’il a voulu rencontrer – il a annoncé une bonne nouvelle. L’homme ne vient pas du néant et ne va pas vers le chaos. L’homme est créé par Dieu ; il est sauvé par le Christ et promis à une destinée immortelle de communion en Dieu. Cette destinée commune à laquelle nous sommes appelés est déjà un motif d’action de grâce et d’émerveillement !
Le ciel est, enfin, une invitation à vivre mieux sur notre terre. Pour dire les choses de façon banale : notre tête peut être tournée vers le ciel mais nos pieds sont bien sur terre, dans un quotidien ordinaire marqué par les finitudes… Il y a, pourrait-on dire, du ciel en nous et c’est ce qui fait notre grandeur. Ce ciel porte des noms variés : intelligence, liberté, conscience, amitié, Esprit-Saint. Peut-être connaissez-vous l’admirable tympan de la basilique de Vézelay ? Il nous montre le Christ en Gloire, les bras étendus en un geste d’envoi. Des rayons partent de ses mains vers les apôtres qui s’agitent, se concertent, se mettent en mouvement. Il s’agit bien sûr de l’image de la Pentecôte. Mais c’est aussi celle de l’Ascension qui en est le prélude. L’Ascension du Seigneur est la condition même du don de l’Esprit. Puissions-nous durant ce mois de juin mais aussi tous les jours de notre vie, dans la puissance du don de l’Esprit, réveiller le meilleur de nous-mêmes pour vivre sur terre avec le ciel dans nos cœurs. C’est aussi cela l’enjeu des fêtes conjointes de l’Ascension et de la Pentecôte. Sursum corda ! Haut les cœurs !
+ Benoît BERTRAND
évêque de Mende